dimanche 20 juillet 2008

Nous craignons la réaction du colonel Kadhafi

(source: la tribune de Genève)
Nous étions les -esclaves du fils Kadhafi et de son épouse. Même s'ils ont été libérés jeudi (lire plus bas), aujourd'hui, nous craignons la réaction du président libyen, car cette affaire survient alors que ce dictateur tente de soigner son business avec les pays européens.» La peur au ventre, les deux domestiques qui ont -déposé plainte contre Hannibal et Aline Kadhafi pour maltraitances racontent «l'enfer vécu avec ce couple de fous».

Dans un flot de paroles, ils évoquent les insultes, les humiliations, les gifles, les coups et les menaces. Des accusations totalement contestées par le couple d'inculpés dénonçant une machination. Pour prouver leur bonne foi, les plaignants nous montrent leurs blessures. Les bras et le visage de Mouna*, 35 ans, sont marqués par des plaies occasionnées peu après leur arrivée à l'Hôtel Président Wilson, le 5 juillet: «Vous voyez sous mon oeil? Hannibal puis Aline m'ont frappée. Elle m'a tapée avec un cintre et j'ai saigné.» La domestique tunisienne a été embauchée le mois dernier. Avant cela, elle travaillait à Dubaï dans une entreprise de jeux vidéo: «Je n'imaginais pas que j'allais vivre un calvaire. Dès le premier jour, je voulais partir de Libye, mais on m'a confisqué mes papiers...»

Agé de 36 ans, Hassan* est au service de la famille Kadhafi depuis six ans. Après ses études à l'école hôtelière, il a travaillé dans un palace en Afrique du Nord, où il est repéré puis engagé comme homme de ménage par Hannibal. Ce Marocain ne semble pas avoir de blessures récentes: «Il m'a pourtant donné un coup de genou et elle m'a tapé avec une bouteille à l'hôtel.» Pourquoi les époux seraient-ils violents? «Ils sont comme lunatiques et elle aime faire mal, estime Mouna. Elle est tout le temps nerveuse, stressée. C'est une jolie femme, mais elle n'est pas belle dedans...»

Château Margaux 1988

Hassan l'interrompt. Il soulève son T-shirt et montre son torse avec une cicatrice (photo) qui date de plusieurs années: «Un des gardes du corps m'a fait cela avec un couteau parce que je voulais quitter mon poste. Mais il avait mon passeport et à chaque fois que je comptais m'en aller, on m'enfermait dans un cachot.» Il se retourne et montre son dos avec des traces de coups de ceinture: «Celle d'Hannibal.» Il tend enfin ses poignets marqués. «On m'a attaché à un arbre. Alors j'ai profité de ce voyage à Genève pour dénoncer les faits. C'est la police qui m'a conseillé de demander l'asile.»

Dans leur récit, les domestiques reviennent sans cesse sur la relation entre les époux Kadhafi. «Elle vit le jour, lui la nuit, explique Hassan. Ils se disputent souvent. Aline ne veut pas qu'il boive parce que ça le rend agressif. Mais parfois il me demande de lui procurer du vin, souvent du Château Margaux 1988. Je lui obéis par peur et du coup, je suis victime des représailles de son épouse.» Les inculpés, dit-il, cherchent des prétextes pour s'en prendre au personnel: «Un plat trop épicé, un verre mal nettoyé et il sort sa ceinture.»

Le plaignant voit-il un avenir en Suisse? «Je ne sais pas, ma mère a été arrêtée lundi à Tripoli et mon frère se cache en Libye. J'ai peur pour leur vie. Mon avocat, Me Membrez, a alerté les autorités marocaines. Ce que je souhaite encore? Etre payé pour avoir travaillé 22 heures sur 24 avec les Kadhafi et surtout redevenir un homme libre.» A ses côtés, Mouna acquiesce.

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